Où se cachent les outardes ?

Où se cachent les outardes ?

Se mettre à la quête d’observer les oiseaux ne rime pas forcément avec jardin, forêt ou même clairière. Les vastes plaines cultivées à l’atmosphère pourtant inhospitalière sont en effet le terrain privilégié d’une espèce pour le moins singulière, habituée des steppes : l’Outarde canepetière. Cette espèce protégée et menacée, victime de l’intensification agricole, est suivie chaque année par la LPO Touraine afin de dénombrer les individus et mieux les protéger. Nous avons donc durant une soirée accompagné Pierre (Chargé d’études) ainsi que Julien (Stagiaire chargé de l’espèce pour cette saison) pour aller à la rencontre de cette espèce discrète et emblématique de la Champeigne tourangelle.

Le dénombrement des mâles chanteurs, reconnaissables à leur collier noir et blanc très visible au milieu des champs, s’effectue par des points d’écoute sur le territoire et leur géolocalisation sur une carte. A première vue, le site semble en effet peu enclin à accueillir autre chose que des lièvres, qui se font d’ailleurs assez nombreux à trouver refuge dans les jachères. Les coins d’ombre se font très rares au milieu de cette morne plaine, écrasée sous la chaleur de mai, et qui semble en tout point déserte. Mais armés d’yeux aguerris et de jumelles, cette première apparence s’estompe rapidement… la vision du courlis cendré, également très menacé en reproduction, apparait et étonne dans cet habitat ! En effet, un couple très occupé à inspecter le sol devient la première espèce observée sur le site.

 

Très rapidement, une outarde mâle se fait entendre. Son chant, une sorte de « PRRRRT » sec et bref, nous permet de localiser plus facilement l’individu qui se fait parfois très discret parmi la végétation malgré son plumage nuptial. Un autre individu nous aura même fait l’honneur de nous laisser assister à sa parade nuptiale, caractérisée par un saut « sifflé » accompagné de son chant. Ces deux mâles, ainsi que les 10 autres qui auront été vus ce jour-là, sont désormais suivis hebdomadairement entre avril et juillet par Julien.

Les mâles, les mâles… C’est sûr qu’on en parle ! Mais qu’en est-il des femelles, alors ? Eh bien, elles sont tous simplement les as du camouflage, ce qui en fait des demoiselles extrêmement discrètes et difficiles à observer. Leur plumage fauve tacheté leur permet en effet de se fondre parfaitement dans le paysage, telles des amazones en mission commando. Nous n’en aurons vu aucune ce jour-là, très certainement camouflées dans les prairies, pourtant à proximité des mâles qui les convoitent. En revanche, pas moins d’une quinzaine d’espèces d’oiseaux différentes auront ponctué cette soirée sur le site : œdicnèmes criards, alouettes des champs, bruant proyer, tarier pâtre… Et une fois le soleil couché, une chevêche d’Athéna sur son domaine.

A la fin de l’été, les outardes se rassembleront afin de préparer leur migration. D’ici-là, nous espérons que les jeunes à venir, secrètement élevés par les femelles dans les parcelles prévues à cet effet, naîtront et grandiront dans de bonnes conditions.

Outarde canepetière © Pierre Réveillaud